Il n’y a pas de magie sans religion, ni réciproquement. Le numérique est chargé d’un mana primitif ou d'une aura virtuelle, qui réactivent nos mythes les plus archaïques et les plus puissants de création. Avec ces croyances et à leur appui, nous avons réactivé les délices et les affres d'une sorcellerie dont nos plus puissants chamans n'auraient pas osé rêver il y a à peine une génération. Lorsque nous buvons la potion numérique, nous pouvons désormais sans difficulté évoquer l'ailleurs, invoquer l'au-delà du virtuel, nous prendre pour un autre, assouvir nos pulsions, pénétrer dans des mondes oniriques capables de compenser toutes nos frustrations terrestres. Et nous pouvons même harceler nos victimes sur les réseaux numériques et les détruire, ou y célébrer et diviniser nos héros, stars et demi-dieux du sport ou du showbiz.
Cette nouvelle sorcellerie n’est plus celle d’individus exceptionnels, des chamans intercesseurs entre nous et le surnaturel. Elle est une production de l’industrie. Elle use d’une autre technologie que les magiciens, d’autres procédures et d’autres rituels, mais en quelque sorte elle est devenue une technoscience objective, à laquelle tous peuvent se faire initier, dont tous sont susceptibles de se servir. Elle vise aussi à une forme de connaissance, de pouvoir, mais elle a d’autres visées que la sorcellerie traditionnelle : des utilités, la gestion et le contrôle, le divertissement. Elle ne nous transporte pas tant du réel dans l’invisible, que du réel dans le possible. Elle survalorisait l’invisible. Aujourd’hui elle survalorise le possible. Elle nous permettait de communiquer avec l’invisible. Désormais elle modélise le possible. Nous ne croyons plus à l’ancienne sorcellerie, dont nous démystifions les illusions. Nous croyons à la nouvelle, qui nous mystifie. Nous dénonçons les superstitions de l’ancienne. Nous croyons à l’efficacité réelle de la nouvelle.
Cette nouvelle sorcellerie n’est plus celle d’individus exceptionnels, des chamans intercesseurs entre nous et le surnaturel. Elle est une production de l’industrie. Elle use d’une autre technologie que les magiciens, d’autres procédures et d’autres rituels, mais en quelque sorte elle est devenue une technoscience objective, à laquelle tous peuvent se faire initier, dont tous sont susceptibles de se servir. Elle vise aussi à une forme de connaissance, de pouvoir, mais elle a d’autres visées que la sorcellerie traditionnelle : des utilités, la gestion et le contrôle, le divertissement. Elle ne nous transporte pas tant du réel dans l’invisible, que du réel dans le possible. Elle survalorisait l’invisible. Aujourd’hui elle survalorise le possible. Elle nous permettait de communiquer avec l’invisible. Désormais elle modélise le possible. Nous ne croyons plus à l’ancienne sorcellerie, dont nous démystifions les illusions. Nous croyons à la nouvelle, qui nous mystifie. Nous dénonçons les superstitions de l’ancienne. Nous croyons à l’efficacité réelle de la nouvelle.
Comment allons-nous nous adapter à ce nouvel âge du numérique? Les ingénus nous voient déjà en posthumains, voire en cyborgs. On peut même craindre que cette nouvelle pensée magique ne nous ramène à l'obscurantisme, tant la sorcellerie numérique dépasse en puissance et en imagination la magie primitive, somme toute limitée et aujourd’hui tenue pour obsolète. Il y a toutes sortes de magies numériques qui sont malignes. Nous devons apprendre à les repérer et à nous en protéger en les démystifiant. Il y en a tout autant ou davantage qui sont bienfaisantes. Nous allons donc nous employer à en évoquer les merveilles. Nous n’avons certes aucune raison d’en bouder les plaisirs. Mais toutes les raisons aussi de ne pas succomber naïvement à des illusions. Car la lucidité conduira l’humanité plus loin dans son évolution que la magie.
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